Accessibilité à la voirie : le Grand Lyon est-il aveugle ?

Accessibilité à la voirie : le Grand Lyon est-il aveugle ?

La scène se produit dimanche 31 mai : un homme, lunettes noires, s’apprête à traverser la rue Antonin Perrin à Villeurbanne. Le bout de sa canne blanche lui indique une plage podotactile censée déboucher sur un passage clouté. Il s’arrête un moment, tendant l’oreille aux moteurs des véhicules qui font office de signalisation sonore. Après quelques minutes d’attente, l’homme s’engage, balayant le pavé avec sa canne lorsqu’une voix féminine retentit avec effroi : « monsieur, arrêtez-vous monsieur ! ».

L’homme stoppe net. Il ne le sait pas encore, mais il se trouve en plein milieu du cours Tolstoï. Sans l’intervention de cette femme, le C3 roulant à vive allure l’aurait happé.

Rien de cela ne se serait produit si la plage podotactile avait été convenablement installée. Celle-ci aurait dû être placée juste en face du passage pour piétons et faire la même largeur. Au lieu de cela, elle déborde sur l’ancien passage clouté, dont les marquages sont encore apparents, et embrasse l’angle du trottoir… qui donne tout droit sur l’intersection (voir photo). Le Grand Lyon, dont la loi du 11 février 2005 oblige à prendre en charge les travaux de voirie, n’a manifestement pas pris la peine de supprimer le tronçon de plage podotactile obsolète, ni même achevé de créer une Commission intercommunale d’accessibilité (CAI) prévue par cette loi.

« Se déplacer devient une horreur ! » tempête Fabienne Kaci. Cette ancienne médaillée de France de ski de fond et mère de deux enfants est non-voyante depuis sa naissance. Fabienne est très connue pour son engagement dans le milieu associatif et en tant qu’intervenante, notamment auprès de l’équipe municipale de Villeurbanne, à qui elle a souvent apporté sa participation dans le cadre des commissions d’accessibilité à la voierie. L’une de ses plus belles victoires : être à l’origine de la pose d’une bande podotactile le long d’un chemin menant au supermarché Carrefour situé dans le quartier des Gratte-Ciel. Mais cela ne suffit pas selon elle : « j’ai beaucoup de mal à m’orienter ; j’essaye d’aller tout droit, d’écouter les gens, les voitures et les feux parlants quand il y en a, mais c’est très dur ».

Outre un manque certain de volonté de la part des pouvoirs publics, qu’est-ce qui pourrait expliquer, à notre époque, ce quasi-désert d’infrastructures destinées aux personnes à mobilité réduite ? Manque-t-on de concertation ? Ne pourrait-on pas allouer une partie du budget intercommunal à cet effet, au lieu de débourser des sommes mirobolantes en frais parfois inutiles ? Pire, doit-on attendre qu’un drame se produise pour que les choses bougent enfin ?

Abdelwahid Djaballah

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