Déjà un an passé au Sénat. Thomas Dossus, à bientôt 40 ans, ("On dit que je suis le 9e plus jeune sénateur de cette mandature"), fut l’écume de la vague verte qui recouvrit Lyon et sa Métropole en juin 2020, soutenu pour devenir sénateur par Grégory Doucet et Bruno Bernard. "J’étais dans le dispositif qui a construit la victoire", rappelle-t-il simplement.
Raymonde Poncet, avait déjà été candidate en 2014, sans aucune chance d’être élue. Elle n’avait pas l’intention d’y retourner en 2020, même si le nombre d’élus verts qui allaient voter à cette élection indirecte avait considérablement augmenté avec les chances pour les écologistes d’emporter deux sièges. Mais quelques jours avant la date de dépôt des candidatures elle croisait un élu socialiste qui lui disait en souriant : "Il paraît que vous n’avez pas de femme candidate chez les Verts ?".
Le sang de Raymonde Poncet ne faisait qu’un tour : le PS se permet encore de dire ça ? Deux jours - et un coup de fil à Bruno Bernard pour entendre la même chose - plus tard, sa décision était prise : il ne sera pas dit que les écolos n’ont pas de femmes candidates : choisie par les militants parmi trois vertes intéressées par le mandat, elle est élue sénatrice deux mois plus tard.
Un an après, en les rencontrant (séparément), il est difficile de savoir si les deux sont encore surpris de ce coup du destin politique aussi inattendu que fastueux, tant ils ont l’air d’avoir pris le pli de leur nouveau mandat. Raymonde Poncet est devenue Raymonde Poncet-Monge, accolant à son nom d’épouse le nom d’un père qu’elle fait constamment surgir dans la conversation, hommage à ce militant communiste qui croyait aux institutions de la République. Thomas Dossus reconnait que l’intensité du mandat n’est pas totalement adaptée à une vie de jeune actif avec enfant.
Y-a-t-il eu des débuts hésitants ? On pense tout de suite au nécessaire achat de nouveaux costumes avec cravates assorties, ce qui est probablement moins pénible à faire que de les porter ensuite. Mais au-delà ?
Thomas Dossus a son sourire discret fugace sur les lèvres au souvenir d’une réprimande du président du Sénat, du haut de sa tribune, qui rappelle à son "cher collègue" que "toute mise en cause personnelle est interdite dans l’hémicycle". Ce rappel au règlement fait suite à une question que le sénateur Dossus venait de poser, faussement innocent, pendant la discussion d’un amendement visant à supprimer la Métropole de Lyon, déposé un peu plus tôt par Etienne Blanc (Les Républicains). Question posée par le parlementaire EELV : cet amendement aurait-il été déposé si leur collègue commun, François-Noël Buffet (Les Républicains aussi) qui traverse par hasard à cet instant l’hémicycle, n’avait pas échoué à la conquérir ?
Aujourd’hui Thomas Dossus décrypte : "On a le droit de mettre en cause un sénateur qui participe à la discussion sur un texte, mais pas un autre sénateur comme François-Noël Buffet. J’ai appris ça à ce moment-là. Mais François-Noël Buffet ne m’en a pas voulu".
"Vous êtes chez vous au Sénat"
Raymonde Poncet se souvient du trac atroce de sa première prise de parole : "Tout le monde te dit de ne pas s’inquiéter, que ça va aller, alors évidemment ça te met encore plus la pression. A un moment de mon intervention, des sénateurs se sont mis à faire du bruit, alors je me suis tue en attendant qu’ils se calment, mais bien sûr ils ont continué, et mon temps de parole s’écoulait. J’ai pris mes feuilles pour montrer qu’il ne me restait que quelques lignes à dire, et à un moment je me suis retourné vers Gérard Larcher un peu vivement et j’ai renversé mon verre d’eau. Heureusement ça ne s’est pas trop vu".
Un soir tard, elle se retrouve totalement seule dans la Salle des Conférences de 700 m². A-t-elle le droit d’être là ? se demande-t-elle un peu inquiète. Le lendemain, persuadée d’être apparue sur les caméras de surveillance dans un endroit sans doute interdit de nuit, elle demande des précisions à un huissier. "Madame, vous êtes chez vous au Sénat", lui répond-il.
Passés ces premiers pas assez vite maitrisés il était temps d’enfourcher leur cheval de bataille.
Tous les deux s’accordent sur le fait que le Sénat impose une charge de travail surprenante. Raymonde Poncet-Monge égrène la liste des textes sur lesquels elle a dû intervenir – seule de son groupe dans sa commission des Affaires sociales dont elle est vice-présidente. Le social est un domaine qui a suivi sa vie professionnelle, à RVI et surtout à la tête d’une grosse association d’aide aux personnes âgées.
Thomas Dossus peut compter sur le binôme qu’il forme avec une autre sénatrice EELV dans sa commission Education et Culture mais rappelle que dans l’ensemble, "nous ne sommes que 12 sénateurs chez les Verts mais on monte sur tous les ballons, donc forcément ça fait plus de travail pour maitriser les sujets". De fait, il participe au débat concernant ces pays demandeurs des objets de leurs passés que la France a récupéré au moment de la colonisation. Mais il questionne aussi le secrétaire d’Etat au numérique (le lyonnais Cédric O) quant à la boite noire de ces algorithmes qui gouvernent ce qui s’affiche sur nos écrans.
Pendant que Raymonde Poncet Monge bataille pour qu’une expérimentation de conservation de son RSA à la reprise d’une activité salariée s’applique aux allocataires de longue durée et pas seulement aux derniers bénéficiaires, ou défend l’augmentation du pouvoir d’achat par le biais d’une diminution des charges contraintes (notamment énergétiques), une partie importante du travail de Thomas Dossus consiste à faire remonter au cœur de la machine législative les enjeux que rencontrent les élus locaux Verts sur le terrain. Parfois c’est très technique, et ça se traduit par des amendements qui n’ont aucune chance de faire le 20h de TF1, comme celui défendu, avec succès, sur l’évolution de la composition des conseils territoriaux de santé dont personne ne connaît l’existence.
"La droite a tendance à faire la leçon à tout le monde"
Pour Raymonde Poncet-Monge on ne peut pas penser une mesure environnementale sans se soucier de ses impacts sociaux et réciproquement : "J’ai dit à Bruno Bernard combien j’appréciais son RSA jeune". Mais elle ne s’intéresse pas au vélo. Thomas Dossus, lui, aimerait bien que le Plan Vélo du gouvernement quitte le domaine des bonnes intentions et du financement des infrastructures pour être enseigné dans les écoles aux enfants qui ne savent pas. "Mais la droite ne veut pas d’une école où l’on fait autre chose qu’apprendre à lire et compter". Il y a bien AVELO 2 financé par l’ADEME, mais selon lui les engagements ministériels tardent à se traduire par des lignes budgétaires qu’il aimerait pouvoir voter.
Mais tous les deux soulignent la difficulté de faire face à une assemblée très à droite. "C’est fou, mais quand je dis que leur poncif selon lequel il faut ‘remobiliser les chômeurs’ c’est du paternalisme et que ça traduit un mépris de classe, ils ne supportent pas. Je n’ai plus le droit de dire ça. Alors que par exemple, la droite passe son temps à parler du coût du travail. Mais si je parle du coût du capital ça fait un drame", s’exaspère Raymonde Poncet Monge. Thomas Dossus n’est pas en reste : "Au Sénat, la droite a tendance à faire la leçon à tout le monde en expliquant que seuls eux savent. Résultat le gouvernement a suivi leur formulation du fameux article 24 de la loi sur la Sécurité et l’interdiction de filmer les forces de l’ordre, et le Conseil Constitutionnels l’a invalidé".
Après les élections consulaires de juin dernier, Thomas Dossus et Raymonde Poncet espèrent bien récupérer un nouvel élu dans leur groupe. Si Esther Benbassa reste, ils seront 13. Cela restera toujours dix fois moins que les 131 sénateurs Les Républicains, mais les jeunes pousses vertes veulent encore grandir.
Quoi??? Elle a gaspillé de l'eau????
Signaler Répondre:-)
Signaler RépondreBilan des écolos : j'ai renversé un verre de flotte et Gérard Larcher m'a grondé devant tout le monde. Pas mal.
Signaler RépondreÇa pousse, bien arrosés, vivement la sécheresse...
Signaler RépondreMerci
Signaler RépondreLe niveau...
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