Enfants actifs l’après-midi, matchs de football le soir…
La sortie des nouveaux films le vendredi, ça se fait déjà aux Etats-Unis et dans la plupart des pays du monde. Résultat : certains blockbusters, c’est-à-dire les films à gros budgets, dépassent le million d’entrées dès le dimanche soir. "Bien sûr qu’il existe un objectif commercial derrière cette proposition", confesse Joël Luraine, le directeur du Pathé Vaise. "Mais il faut profiter de la promotion que la télé ou les journaux peuvent faire dès le vendredi. Aujourd’hui, on parle d’un nouveau film le dimanche, et il sort trois jours plus tard. Avec ce nouveau jour, ça va bouger les habitudes des Français et on pourra concrétiser tout de suite une envie", poursuit le responsable du multiplex.
Aujourd’hui, il est vrai que les chiffres de fréquentation sur une semaine pour un nouveau film jouent au yoyo : d’abord excellents dès le mercredi, ils chutent les deux jours suivants avant de repartir à la hausse pour le week-end. "Les Français ont un autre style de vie : les enfants ont des activités le mercredi après-midi, voire ils vont à l’école, et leurs parents préfèrent rester chez eux en semaine, notamment pour voir les matchs de Ligue des Champions, diffusés le mercredi soir. Le vendredi, de plus en en plus de monde pose des RTT pour avoir plus de temps libre", commente Joël Luraine.
Les petits films risquent de souffrir
Mais comme pour tout changement, il y a bien une ombre à l’affiche : les petites productions, plus culturelles ou élitistes, seraient délaissées. Car les spectateurs privilégieraient le week-end les divertissements, type comédie ou action. "C’est un changement inutile", affirme Patrick Arnaud, le directeur du Ciné 89 à Saint-Priest, "car les films qui doivent faire beaucoup d’entrées les feront de toute façon, que ce soit le mercredi ou le vendredi." Autre phénomène à prendre en compte pour le directeur de ce complexe de deux salles dans l’est lyonnais : le bouche à oreille. "Le public qui vient voir ces petits films se déplace généralement en semaine. Il communique ensuite autour de lui ce qu’il en a pensé, et c’est ainsi qu’une production se fait une certaine réputation. J’ai peur qu’avec des sorties le vendredi, ce bouche à oreille s’arrête", commente Patrick Arnaud.
Une solution au piratage ?
"Attendre trois jours de moins pour voir le film dont on a envie, ca peut être une solution au téléchargement illégal, car le film sera disponible tout de suite", admet Joël Luraine. Mais son homologue de St-Priest n’est pas si catégorique : "Même si le vendredi permettra de faire plus de sorties mondiales, cela ne résoudra en rien la filière des copies canadiennes. Les films sortent aux Etats-Unis et au Québec en même temps, avec une traduction en français presque immédiate et disponible dès le soir même sur Internet. C’est une illusion !", s’exclame Patrick Arnaud.
Gwenaël Windrestin