Alors que l’ensemble du Grand Lyon était en proie à des scènes de violences extrêmes en fin de semaine dernière, le Tribunal judiciaire de Lyon a dû faire face à l’afflux important d’émeutiers interpellés. La plus grande salle du nouveau palais de justice, la 16e chambre, a été mise à disposition pour les juger.
“J’avais besoin de décompresser un petit peu”
Le premier émeutier à comparaître dans l’imposante 16e est un homme de 29 ans, bien connu de la police et de la justice. Il a déjà fait l’objet de neuf condamnations, notamment pour des faits de violence et outrage ou encore de conduite sous l’emprise de stupéfiants et ce, sans permis ni assurance.
Lui est reproché le fait d’avoir tiré des mortiers d’artifice sur un véhicule blindé du RAID et sur les agents qui l’occupaient. Vendredi dernier, à 22h, l’homme sort du travail. Désemparé par l’absence de transports en commun pour rentrer chez lui et désoeuvré, l’homme décide de passer la soirée en ville. Après quelques verres, selon la défense, il aurait croisé la route d’émeutiers et aurait acheté un mortier d’artifice à l’un deux.
Arrivé au niveau de la place des Cordeliers, l’homme tire ensuite sur un véhicule du RAID en patrouille. Les policiers, visiblement plus véloces et endurants que notre protagoniste fumeur de joints, l’interpellent à 23h20 aux abords de la Grande pharmacie lyonnaise.
Dans le box, il reconnaît les faits. “Madame, j’ai fait de la merde, c’est tout”, répond-t-il à la présidente qui l’interroge sur ses motivations ce soir-là. “Franchement, je sais pas quoi vous dire, j’ai fait de la merde, j’ai fait de la merde !”, répète l’homme, visiblement peu bavard et articulé, en haussant les épaules.
“Vous avez été interpellé il n’y a pas très longtemps, certes, mais quand même, vous ne pouvez pas produire une réflexion plus importante ? Qu’est-ce que vous vouliez faire ?”, s’interroge la juge.
“Franchement, je suis désolé et je regrette ce que j’ai fait. Bon, c’est trop tard pour regretter mais …”, concède alors le prévenu.
“J’avais besoin de décompresser un petit peu”, avait-il simplement dit aux enquêteurs qui l’avaient interrogé lors de sa garde à vue.
Une interpellation dans la salle en pleine séance
“Je crois que c’est important qu’il soit entendu, aujourd’hui, à travers cette comparution, qu’il y a des réponses judiciaires à ces violences”, commence la procureure, en décrivant un “contexte de quasi guerre civile”, tout en reconnaissant que l’émotion suscitée par la mort de Nahel est légitime.
“Il y a une population lyonnaise qui vit dans la peur quotidienne de ce qui va se tramer le soir, quand ils sont en ville ou chez eux”, continue l’avocate générale, avant de requérir deux ans d’emprisonnement avec maintien en détention pour l’agent d’entretien, avec la peine secondaire d’interdiction de paraître à Lyon.
L’avocat de la défense, qui commence à peine sa plaidoirie, est alors interrompu par un chahut dans la salle. Un homme portant un t-shirt “Nike la police” est en train de filmer la séance, ce qui est interdit. Les policiers demandent à l’homme de quitter la salle et finissent par l’interpeller de force sous les cris et huées de l’assistance, donnant lieu à d’impressionnantes scènes de manifestation dans la salle des pas perdus.
Audience suspendue et salle évacuée au tribunal de #Lyon qui jugeait 25 émeutiers : des militants d'ultragauche chantent "tout le monde déteste la police" devant des avocats médusés pic.twitter.com/9EMPtwp3Bo
— Lyon Mag (@lyonmag) July 4, 2023
Après l’intervention de la Compagnie Départementale d’Intervention (policiers nationaux), la séance reprend après une suspension de séance de plus d’1h30.
L’avocat de la défense a ainsi pu faire valoir devant le tribunal l’importance capitale pour son client de rester en liberté pour continuer de travailler. Avec une enfance difficile, un profil de paumé toxicomane et un passif judiciaire important, l’homme semble enfin sortir la tête de l’eau avec sa micro-entreprise, malgré sa rechute vendredi dernier.
Le tribunal semble avoir été convaincu par cette défense finement dirigée. Le quasi-trentenaire sera finalement placé sous un régime de semi-liberté pour une durée de neuf mois, lui permettant de travailler la journée tout en étant placé en détention pour la nuit.
J.B
Des sanctions, enfin !
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