En 1979, Jean-Marc Rouillan et André Olivier fondent Action Directe en mitraillant à Paris le siège du CNPF, le syndicat patronal qui deviendra ensuite le Medef. Leur objectif : montrer que dix ans après mai 68, rien n'a changé en France.
Ils considéraient que l'action politique était impuissante pour réformer la société. Et qu'il fallait donc passer à l'action violente. Ils deviennent des militants révolutionnaires, sur le modèle de la bande à Baader en Allemagne ou des Brigades rouges en Italie.
Action Directe va se développer à Lyon. Car un an après le mitraillage du CNPF, Rouillan et Olivier se brouillent pour des raisons davantage personnelles que politiques. Il ne peut y avoir deux chefs. Et André Olivier, qui est professeur, fonde la branche d'Action Directe Lyon avec Max Frérot, qui avait été son élève au lycée technique du boulevard des Tchécoslovaques.
Il connaît bien la ville pour y avoir fait ses études de lettres, avant de rejoindre le mouvement "La gauche prolétarienne" avec lequel il a fait mai 68. Lyon et le Rhône représentent également aux yeux d'André Olivier une place forte du capitalisme, avec des patrons puissants et de nombreuses grandes entreprises : Elf, Rhône-Poulenc, La Rhodia, Renault Véhicule Industriel RVI. Et puis les révoltes des Canuts lui rappellent qu'il y a une tradition lyonnaise de violence contre l'ordre établi.
Physique d'intellectuel avec ses cheveux dégarnis, sa barbe et ses lunettes, il avait un certain charisme qui fascinait les membres d'Action Directe. Il était aussi un antisémite notoire.
Max Frérot lui, était l'artificier du groupe, se servant des choses qu'il avait apprises au cours de son service militaire. Comme Emile Ballandras, il était l'un des membres les plus radicaux, n'hésitant pas à faire feu lors des braquages.
Les deux derniers membres du noyau dur, Bernard Blanc et Joëlle Crépet, étaient moins engagés. Crépet, ancienne infirmière, avait rejoint Action Directe car elle était amoureuse d'André Olivier.
Pendant six ans, le groupe clandestin d'André Olivier et de ses militants réalise plus de 30 braquages et attentats, ainsi que trois assassinats.
Fin mars 1986, André Olivier est arrêté avec Bernard Blanc sur le boulevard Stalingrad à Villeurbanne. Olivier venait de rendre visite à sa fille.
Le lendemain, une perquisition menée dans une planque d'Action Directe à Saint-Etienne permet de retrouver les Mémoires de Max Frérot, dans lesquelles il racontait les différents hold-up commis, ainsi que la vie clandestine du groupe. Ce qui a permis aux forces de l'ordre d'identifier et arrêter tous les membres. Sauf Max Frérot, qui s'est caché pour finalement être arrêté dans un parking souterrain de la Part-Dieu en novembre 1987.
Une quinzaine de personnes avaient été arrêtées, et elles étaient changées régulièrement de prison pour éviter une évasion. Aucune visite ne leur était accordée, les activistes étaient incarcérés dans des cellules isolées et le GIPN était mobilisé lors de leurs transfèrements.
La justice les accusait d'une trentaine de braquages et d'attentats à l'explosif commis entre 1980 et 1986. Trois personnes avaient été tuées par Action Directe : le convoyeur de fonds Henri Delrieux en octobre 1980 à Caluire, le policier Guy Hubert lors d'un braquage de banque aux Brotteaux en novembre 1981 et le général Guy Delfosse, dans une banque de la rue Victor Hugo alors qu'il tentait de raisonner les braqueurs.
Pour se défendre, André Olivier et Max Frérot avaient choisi Me Jacques Vergès, car l'avocat médiatique avait présidé l'Union internationale des étudiants communistes dans les années 50, puis avait défendu des membres du FLN après la guerre d'Algérie.
C'était le premier procès d'un groupe terroriste en France. L'occasion de comprendre comment ces militants politiques ont pu devenir des criminels. Mais ces derniers n'exprimeront jamais aucun remord.
Le procès était présidé par André Cerdini, qui avait déjà jugé Klaus Barbie. Exceptionnellement, les jurés n'étaient pas de simples citoyens tirés au sort, mais sept magistrats professionnels.
De nombreux journalistes ont couvert l'audience au palais de justice des quais de Saône. Ce dernier avait été transformé en forteresse avec des portiques inédits pour détecter les armes à l'entrée, des tireurs d'élite sur les toits du bâtiment et des itinéraires différents chaque jour pour les trajets des accusés entre les prisons de Saint-Paul, Saint-Joseph et Montluc et le tribunal.
Le 16 mai 1989, le procès s'ouvre à Lyon. Derrière des vitres pare-balles, les accusés refusent de décliner leur identité, expliquant ne pas reconnaître cette "justice réactionnaire".
André Olivier a ensuite raconté son parcours, évoquant ses origines modestes, la guerre d'Algérie qui a été un déclic, sa haine des intellectuels de gauche qui étaient entrés dans le système comme Serge July le patron de Libération et Bernard Kouchner, secrétaire d'Etat chargé de l'Action humanitaire. Sans oublier un mot de soutien à son ancien compagnon de lutte Jean-Marc Rouillan, qui avait assassiné deux ans plus tôt le PDG de Renault, Georges Besse.
Le procès fut l'occasion de comprendre qu'au-delà du noyau dur, les autres membres étaient moins engagés, moins dangereux. Deux Guadeloupéens, Jean-Charles Laporal et Jean-Pierre Succab, ont affirmé adhérer davantage à la personnalité d'André Olivier qu'à son discours. Quant à Nicole Faure, elle était là par amour pour Bernard Blanc, pas par idéologie.
Les débats sont régulièrement interrompus par Max Frérot et André Olivier qui insultent les juges, les traitant de "cons" ou de "fascistes". Le président Cerdini n'a d'autre choix que de les expulser de l'audience.
Un témoignage très émouvant fut apporté par l'homme qui avait assisté au meurtre du général Guy Delfosse. Dans cette agence bancaire de la Presqu'île, il avait tenté de raisonner Frérot, prenant même le risque de lui faire la morale car ce dernier le tutoyait. Courageux, le général l'avait payé de sa vie, abattu à bout portant avant d'être achevé d'une balle dans la tête par le membre ultra-violent d'Action Directe.
La défense tenta de mettre en avant la dimension politique du combat mené par les terroristes lyonnais. "Car on savait que la plupart de nos clients prendraient la perpétuité. Du coup, notre objectif était d'expliquer le sens de leur engagement", se rappelait Me André Buffard, l'avocat de Bernard Blanc interrogé par LyonMag en 2006.
Sauf qu'André Olivier ne leur facilitait pas la tâche, traitant à nouveau les magistrats de "salauds" et d'"ordures", en les menaçant d'être un jour, avec leur famille, jugés par un tribunal populaire.
Après six semaines de procès, le verdict est tombé le 29 juin à 1h du matin : perpétuité pour André Olivier, Max Frérot et Emile Ballandras. Bernard Blanc prend 20 ans, Joëlle Crépet 18 ans, Jean-Claude Laporal 7 ans, Jean-Pierre Succab 5 ans et Nicole Faure s'en tire avec 2 avec sursis.
A l'énoncé du verdict, Olivier, Frérot, Ballandras et Blanc se lèvent et chantent l'Internationale le poing levé, avant de crier "A mort Cerdini !".
Comme Jacques Vergès l'avait analysé sur les marches du palais de justice, on venait de juger les derniers révolutionnaires.
Et le SAC , groupe d action mafieux dirigé par Pasqua.....
Signaler RépondreBen oui. Ce procès historique empêche les attentats d'extrême droite ? Quel rapport ? Ça veut faire diversion par ici...
Signaler Répondre" Il était aussi un antisémite notoire." Comme la plupart des extrêmes gauchistes d'aujourd'hui.
Signaler RépondrePour rassurer tout le monde Suzanne en 2005 et ma mère 10 ans après...Faute d'orthographe abattu et non abbatu comme je l'avais écris .
Signaler RépondreUn groupe terroriste d'extrême gauche .......
Signaler RépondreMais bon, le danger, c'est l'extrême droite comme le clament le gouvernement et les médias .....
Combattants de la liberté!
Signaler RépondreElle est bien cette série sur des épisodes de l’histoire récente. Ça change des faits divers à chaud. Merci aux auteurs. Svp continuez.
Signaler RépondreMa mère a été aidé à domicile de nombreuses années de Suzanne la directrice de la BNP ou Guy Delfosse à été abbatu sous yeux...la pauvre femme ne s'en est jamais remis et vécu littéralement traumatisée par cette scène jusqu'à la fin de ses jours.
Signaler RépondreUne des conséquences de mai 68.
Signaler RépondreAu trou !
Signaler Répondre1989 : procès d'Action Directe
Signaler Répondre20..? : procès des black blocs, ennemis de la nation française.
On peut rêver.
Ce n'étaient pas des révolutionnaires mais des fous furieux meurtriers...
Signaler Répondreest un censeur pro gochard au top
Signaler RépondreLe PDG Georges Besse de Renault venait d'expliquer aux syndicats qu'il allait supprimer de nombreux délégués permanents ( ce qui devrait être réalisé de nos jours de partout et surtout chez les profs.)
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