Hier en Algérie, aujourd'hui en Syrie

Hier en Algérie, aujourd'hui en Syrie
Romain Blachier

Ces jours-ci, l'actualité est emplie du souvenir d'un événement enfanté dans les soies amères de la violence : les accords d'Evian, qui allaient amener l'Algérie à son indépendance de destin. Une indépendance qui ne veut pas dire mutuelle indifférence tant les histoires aujourd'hui d'hier s’entremêlent comme celles de deux amants tourmentés et attirés, qui rompent en vagues douces-amères pour mieux se reprendre.

A l'époque, il y avait les nationalistes algériens de toutes obédiences (Lyon fut au départ un bastion du MNA avant de virer FLN) qui luttaient pour leur indépendance. Et puis, vinrent un certain nombre de progressistes français, dont le tout jeune Michel Rocard, au nom de la liberté des peuples et de la lutte contre la torture, aider ceux qui souhaitaient permettre à l'Algérie de vivre son destin de façon libre. On pourra certes, pour certains d'entre eux, parler parfois d'aveuglement devant un FLN bien plus réactionnaire que ce que voulaient le voir ces porteurs de valises. En sont témoins beaucoup de progressistes algériens, comme Ait-Ahmed, qui le quittent une fois l'indépendance acquise. On pourra aussi certes regretter les silences de quelques un, pas tous, de ces mêmes amis de l'Algérie indépendante devant les assassinats de masse des harkis, foulant aux pieds des accords d'Evian demandant le respect de chaque acteur du drame. Mais ceux qui dénonçaient l'injustice insupportable de la situation coloniale, la violence des troupes françaises, mettant les droits des humains au-dessus de toutes les causes - sans non plus fermer les yeux sur les violences commises de l’autre côté - ne peuvent avoir que notre sympathie.

Aujourd'hui, c'est l'histoire d'un autre injuste léviathan qui doit nous poser question, engager notre combat, sans nous faire perdre non plus notre lucidité : celui de la Syrie.
Le choix est pourtant simple au premier abord : voici Bachar Al-Assad , un leader de régime clairement dictatorial qui tue son peuple. L'homme a pourtant été reçu en grande pompe par Nicolas Sarkozy il y a quelques années, afin que nos troupes le saluent le jour de la fête de la République Française. Au passage, cela a du faire étrange à nos vétérans de la guerre du Liban, dont certains camarades ont été tués par la complicité de ce même régime syrien...
Ce dictateur, par ailleurs notoirement antisémite ce qui lui vaut quelques sympathies peu ragoutantes dans quelques milieux douteux de France, procède désormais à l'assassinat de masse de son peuple, à sa torture, à son enlèvement, au viol de ses femmes, au meurtre des hommes, des vieillards, de ses enfants.

Face à cela, les dirigeants du monde arabe restent, comme trop souvent, dans les arcanes complexes et timorés des conciliabules de chancelleries.
Les instances internationales ne sont pas plus à l'honneur : elles sont paralysées par le blocage de la Chine et de la Russie. Mais aussi, certes dans une bien moindre mesure, par un Alain Juppé qui, tout au long de sa carrière, de la Yougoslavie en passant par la Libye, a toujours été d'un immobilisme n'évoluant que lorsque sa main était forcée d'agir par d'autres, de ses amis comme de ses adversaires.
Que faire en attendant qu'une issue soit trouvée par les Etats et les institutions internationales ? S'indigner ? Manifester ? C'est déjà mieux que l'indifférence. Free Syria Lyon organise des événements dans notre ville à laquelle chaque homme et chaque femme de conscience peut s'engager.

France Syrie Démocratie, association que j’ai rejoint, membre de ce collectif, essaie d'agir également sur le terrain. Les Syriens ont besoin de se défendre mais aussi de médicaments et d'aide. C'est pour cela que nous avons envoyé le docteur Jacques Bérès ainsi que du matériel médical sur place. Et puis la France s'honorerait sans doute en acceptant recevoir dans ses hôpitaux pendant quelques temps certains grands blessés qui ne peuvent pas être soignés en Syrie.

Hier en Algérie, aujourd'hui en Syrie. A cinquante ans de distance, il ne faudrait pas que, dans la nasse du quotidien d'un Mammon moderne, nous ne soyons pris d'indifférence, cette lente maladie qui conduit à la dégradation de notre qualité d'humains.

Retrouvez tous les billets de Romain Blachier sur son blog Lyonnitude(s).
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1 commentaire
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elder le 10/04/2012 à 01:30

"Les arcanes timorés des conciliabules de chancelleries", que voulez vous répondre à ça ? Si vous avez besoin d'un interprète, voici ma traduction.
Chaque 19 mars, tout socialiste a l'obligation envers le Parti de montrer son attachement à ses valeurs anticolonialistes. En tout premier lieu le devoir de fêter la "victoire" du FLN, et de ses alliés les "porteurs de valise" socialistes et communistes il y a 50 ans, en 1962.
Victoire acquise dans les hôtels de luxe d'Evian, parce que sur le terrain, en Algérie en 1962 il n'y en avait plus un pour sortir le bout de son nez. Le FLN, il se planquait en Egypte, en Tunisie, en Lybie.
Alors, comme les Français sont stupides et n'ont aucune mémoire, pourquoi ne pas tenter dans LyonMag un subtil amalgame entre la dictature sanguinaire de Bachar el Assad et la France colonialiste en Algérie ? Fastoche, y'a qu'a dire que nous aussi on tirait au canon sur les Français d'Alger et d'Oran !
Si vous avez oublié ou si vous êtes trop jeunes, on appelait "Porteurs de valises" ceux qui convoyaient vers la Suisse les valises de billets extorqués sous la menace à tous les travailleurs Algériens de France, près d'un demi million à l'époque.
"Impot révolutionnaire", qu'ils appelaient ça, et malheur à celui qui refusait de payer. Bien sûr, ces petits messieurs recevaient une confortable commission au passage.
Tiens, même Rocard en faisait partie ? Je l'apprends ici.
A Villeurbanne, ces collabos s'exhibent à travers une exposition soutenue par la mairie. En 18, en 45, ils auraient été passés par les armes comme traîtres, aujourd'hui ils se pavanent en ville.
Le MNA de Messali Hadj a disparu parce que le FLN a systématiquement assassiné tous ses membres, en France et en Algérie. 4000 morts, ça, il ne vous le dit pas, le Monsieur.
L'argent racketté servait à acheter des armes dans les pays de l'Est, on ne saura jamais combien de jeunes Français appelés ou rappelés sous les drapeaux ont été tués par les bons soins des petits copains français du FLN. Secret défense !
Monsieur Mitterrand, ministre de l'intérieur à l'époque, qui nous a envoyés là-bas sans nous demander notre avis, n'y a jamais rien trouvé à redire. On n'était pourtant pas des volontaires, mais de simples troufions qui croyaient servir la république.
Toutes les opinions sont admises, celle-ci pue encore, après un demi-siècle.

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