56 jours de festival, 42 spectacles pour 118 représentations, le
festival lyonnais est une grosse machine. Cette année encore les
spectateurs auront droit à six créations mondiales, et sept premières
françaises.
Si lors des précédentes éditions la programmation pouvait
rendre jaloux de nombreux festivals de par une programmation qui
couplait qualité et notoriété, en 2013 les Nuits ont fait plus sobre.
Côté "stars" internationales, on notera la venue dans les ruines de la
colline qui prie de Madness, Diana Krall, Patti Smith ou Keith Jarrett
et Salif Keita. Pour le reste, hormis les traditionnels artistes
français de renom (cette année Benjamin Biolay, IAM, Jacques Higelin et
-M-), on sent dans la programmation une envie de faire découvrir de
nouveaux horizons.
Finis les groupes ou formations de rocks célèbres
des années passées (Arctic Monkeys, Stone Roses, Texas, Kasabian), place
cette année à plus de retenue. Le jazz se taille une part non
négligeable avec par exemple Diana Krall, Melody Gardot, Archie Shepp
et bien entendu les habitués du trio de Keith Jarrett (qui ne joue que
dans des "maisons amies" s'enorgueillit le directeur Dominique Delorme)
avec Gary Peacock et Jack Dejohnette. Le rap sera lui représenté par
une nuit marseillaise, avec les inévitables IAM précédés des Psy 4 de la
Rime. Les musiques dites "du monde", aux accents de lyrisme
exacerbés, ont quant à elles une place prépondérante dans cette
programmation d’orfèvre : entre Dead Can Dance, Sigur Rós, on en perdra
son latin pour filer vers la sensation. Car c’est là l’objectif de
Richard Robert, nouveau conseiller artistique des Nuits venu des
Inrockuptibles : programmer des artistes rares.
Et c’est chose faite :
Nick Cave ("bête de scène d’une grande élégance", Crosby, Stills and
Nash ("trois fortes têtes" de Woodstock), Madness ("quintessence de
la pop anglaise qui ne s’était jamais produit à Lyon et dont on repart
des concerts avec 3-4 kilos en moins"), Rokia Traoré ("rockeuse
malienne"), George Clinton (pour un "show débridé très funk"),
Archive et tindersticks (qui partagent "une vision romantique et
fiévreuse de la musique"), ou Patti Smith (icône "amie du festival").
A noter par ailleurs une nuit "que vous n’oublierez pas", pour
reprendre le slogan du film de présentation, car elle mêlera Lescop,
Sinéad O’Connor et les improbables CocoRosie.
La France est
représentée comme il se doit avec la "folk réinventée" de Lou Doillon,
la folie habituelle de –M- et même Raphael, qui ne voulait au départ
pas tourner avec son nouvel album Super Welter mais s’est laissé tenter
par une carte blanche et qui revisitera son répertoire en présence
d’invités comme Christophe, avec en première partie la lyonnaise
Buridane, qui avait déjà assuré celle de Jacques Dutronc à Fourvière en
2010.
Dominique Delorme s’est également clairement félicité d’accueillir
un autre lyonnais très en vogue ces derniers temps (il a notamment
réalisé les clips de Lana del Rey), et "qu’ici on appelle de son vrai
nom Yoann Lemoine", à savoir Woodkid, qui ouvrira les concerts avec une
prestation symphonique accompagné des musiciens de l’Orchestre
National de Lyon.
Cet esprit est palpable également dans la
programmation théâtrale qui ouvrira le Festival. Antigone sera donnée
dans le jardin de Cybèle, un espace au sommet du site utilisé pour la
première fois pour retrouver les conditions de jeu du théâtre antique.
Son metteur en scène Gwenael Morin, nouveau directeur du théâtre voisin
du Point du Jour, entend s’y servir des ruines antiques pour y "ensemencer notre image" à travers les mots millénaires de Sophocle,
porteurs d’une "expérience de l’imagination comme acte politique
responsable". Le chœur de cette pièce sera d’ailleurs ouvert au public.
Même chose pour le Cyrano de Rostand, mis en scène à Fourvière pour le
première fois dans l’Odéon par Georges Lavaudant.
Côté planches, la
surprise viendra aussi de Cécile de France, que l’on découvrira dans
Anna, mis en scène en première mondiale par Emmanuel Daumas. Il s’agit
en fait d’une adaptation musicale d’un téléfilm quasi expérimental de
1967 dont la musique avait été écrite par Serge Gainsbourg qui lui
offrit à l’époque Sous le soleil exactement. Serge Valletti continuera
lui son voyage dans Aristophane avec un étonnant marathon : de midi à
minuit, il lira six pièces de l’auteur vieux de 25 siècles dont il s’est
mis en tête de la traduire intégralement. L’opéra sera fêté avec un
Carmen de Bizet dynamité par Mario Tronco.
Enfin l’expérience des arts
du cirque sera de nouveau au menu (avec 55 représentations, c’est
encore l’art le plus représenté). Le Parc de Parilly, qui accueillait
l’an dernier le théâtre équestre de Zingaro, verra cette année
s’installer le cirque Plume pour un spectacle baptisé Tempus Fugit qui
se propose de mettre en scène 30 années de vie.
Le cirque Lili occupera
lui l’esplanade sous l’Odéon avec FoResT, un spectacle de jonglage "dramatique et dramaturgique" dans lequel Jérôme Thomas présentera une "réflexion sur le rapport à l’autre" et une "synthèse poétique" de
l’art du jonglage, avant de laisser sa place au cirque Aital avec Pour
le meilleur et pour le pire, allégorie tout en voltige du couple. Les
danseurs de Circa et le Quatuor Debussy s’associeront pour donner une
première mondiale d’Opus autour de Chostakovitch.
La danse qui ne sera
pas en reste non plus avec une adaptation des Mille et une nuits, un
hommage à la culture musulmane par le Ballet contemporain d’Alger ou le
tango argentin revisité par Sidi Larbi Cherkaoui.
On l’aura compris,
pour Fourvière 2013, on sera dans la sensation, dans l’expérience
musicales, avec des artistes qui sortent des canons des sentiers battus
et affirment leur identité sans se soucier du succès. Objectif donc,
prouver qu’avec une programmation aussi pointue, on peut faire mieux que
le record établi l’an dernier avec environ 166 000 spectateurs.
Histoire que les Nuits ne soient pas pour rien "le deuxième festival à
entrée payante de France".
L'année dernière on a payé cher pour voir Sylvie Guilhem, on a eu le sentiment de se faire voler...cette année on sera beaucoup plus prudent...depuis quelques années, il me semble que les Nuits de Fourvière...comme la Biennale, ce n'est plus pareils...
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