Une page va se tourner pour Decitre. A Lyon, la librairie historique
du 6 place Bellecour va fermer. Elle avait été ouverte en 1907. C’est
un crève-cœur ?
"Alors ce n’est pas un crève-cœur parce qu’on a
toujours notre très belle librairie du 29 place Bellecour. On va
regrouper notre librairie des langues avec celle-ci. Mais effectivement,
elle est là depuis 100 ans, je l’ai connu enfant. Il y a un côté
nostalgique même si on a ouvert il y a un an une librairie à Confluence,
c’est la vie des affaires !"
Comment va se passer ce regroupement place Bellecour ?
"Depuis
plusieurs années, les clients nous disaient "Vous avez deux librairies
place Bellecour, ça serait bien de les regrouper parce que ce serait
plus pratique pour nous". Avec l’arrivée à Confluence et la conjoncture
qui n’est pas très simple, on a pris cette décision. Toutes les
activités seront regroupées au 29 et le 6 fermera dès le 5 mai. On
rouvrira celle du 29 le 11 mai après des travaux, on va repenser la
librairie pour qu’elle soit plus agréable pour nos clients.
La
deuxième grosse mesure de ce plan d’économies, c’est la mise au chômage
partiel de vos 400 salariés répartis sur les neuf librairies de Decitre.
Comment le ressentent-ils ?
"Alors on n’appelle plus ça chômage
partiel mais activité partielle. Concrètement, comme beaucoup
d’entreprises en France, on a vu une petite baisse d’activité (4%) dans
nos magasins. Et comme l’activité est saisonnière, l’essentiel des
ventes se fait entre fin août et fin décembre, on demande à toutes nos
équipes de travailler 10% de moins avec un salaire maintenu. L’Etat
prend à sa charge les 10% restants. C’est du win-win-win : pour le
client, le service Decitre est conservé – pour l’entreprise, ca permet
de faire des économies conséquentes – pour l’Etat ca évite des plans de
licenciement. Je m’engage à ne pas en faire pendant un an et demi. La
période nous permet de faire le dos rond et en parallèle, on a tout un
tas d’activités qui croissent comme Internet, Confluence ou les livres
numériques."
Comment le prennent les équipes ?
"Très largement, les équipes de Decitre comprennent ce
qu’il se passe. Il y a toujours un petit peu d’inquiétude. Il faut
comprendre qu’une entreprise doit se développer. Decitre n’est pas du
tout sur le point de déclarer faillite. Mais le marché du livre est en
pleine mutation et il faut qu’on ait des moyens pour s’adapter."
Sur
2012, le marché du livre a connu une baisse de 3%. On résiste plutôt
mieux que l’automobile ou l’immobilier. Il y a cependant la montée en
puissance du livre numérique, on a dépassé les 100 000 ebooks vendus
depuis quelques mois.
"Dans nos magasins, il y a cinq ans, on vendait
90% de livres et 10% de papeterie. Aujourd’hui, on est plutôt sur du
80-20. On est donc absolument convaincu que du livre papier, il va s’en
vendre encore très très très longtemps. On veut continuer à offrir un
service de libraire de grande qualité avec des équipes extra tout en
gagnant de l’argent pour payer tout ce qu’on doit payer."
S’installer
à Confluence, c’était une bonne idée ? Parce qu’on entend certains
magasins dire que c’est très calme à part durant les vacances scolaires
et les week-ends.
"On est ravi d’être à Confluence. On voit une
activité durant la semaine qui est plus calme que ce qu’on avait imaginé
mais le week-end, on a plus de monde que ce qu’on avait imaginé. Je
rappelle que l'on est dans un quartier en plein expansion et il faut se
projeter sur une échelle de temps qui n’est pas de quelques mois mais de
plusieurs années."
Il y a quinze jours, vous avez été reçu avec
les autres professionnels du livre par François Hollande. J’imagine que
vous lui avez fait part des difficultés rencontrées par votre secteur.
A-t-il pu vous rassurer ?
"Il y a un certain nombre de mesures qui a
été annoncé quelques jours après par la ministre de la Culture à
l’occasion du salon du livre. Moi je suis assez pragmatique donc
j’attends quand même de voir concrètement ce qui va se mettre en place.
On a des sujets de concurrence potentiellement déloyale, notamment avec
les Etats-Unis, sur lesquelles je pense que le gouvernement a un vrai
rôle à jouer."
Les Lyonnais vont continuer à acheter des livres selon vous ?
"Avec
la sortie de quelques grands titres, on a fait un très beau mois. Des
centaines de milliers de personnes viennent à Decitre tous les mois, je
les remercie."
Interview lénifiante et hypocrite :
Signaler Répondre"On est ravi d’être à Confluence."
"Très largement, les équipes de Decitre comprennent ce qu’il se passe. Il y a toujours un petit peu d’inquiétude. "
"Alors on n’appelle plus ça chômage partiel mais activité partielle. "
"C’est la vie des affaires !"
Oui, les affaires avant tout, les salariés après, les licenciés harcelés.
Combien les fonds de pensions possèdent-ils de part dans la structure Decitre ?
Signaler RépondreLa société qui possède Decitre, via Guillaume Decitre, a son siège social au Luxembourg.
Signaler RépondreDecitre n'a pas attendu la crise pour faire des licenciements injustifiés. Une consultation du greffe des Prud'hommes de Lyon serait édifiante, et ferait un bon article.
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