C’est parti pour six jours de festivités. Les Nuits Sonores débutent ce
mardi à Lyon, notamment avec Diane pour la première fois aux
Subsistances. Quels sont les incontournables de ce festival ? "Il y en a
pas mal, puisqu’il y a 250 artistes. Du côté des Subsistances, il y a
la journée très attendue avec Laurent Garnier et Carl Cox. Sur les
nuits, on peut citer la soirée norvégienne qui a un plateau vraiment
intéressant. Difficile d’en dire plus, car c’est une programmation que
l’on veut présenter dans son ensemble. Nous ne sommes pas un festival de
têtes d’affiche, on essaye de montrer un panorama un peu global".
Depuis
2011, en plus des événements musicaux culturels, vous organisez
l’European Lab, un forum sur cinq jours où se réunissent des acteurs du
monde culturel, économique, politique et médiatique. Quel est le but de
ces rencontres ? "C’est de rassembler des acteurs qui pensent
aujourd’hui que les politiques culturelles au niveau français et
européen ne sont plus adaptées à l’époque. Il y a environ 150
intervenants venant d’une quarantaine de pays différents, dans toute
l’Europe et même dans le monde entier. Ils sont tous, à leur échelle,
acteur de l’innovation culturelle, c’est-à-dire soit dans le domaine des
nouvelles technologies, des nouveaux médias, soit dans le domaine de
l’événement et du festival. Tous pensent qu’il faut réadapter les
politiques culturelles aux enjeux d’aujourd’hui. Enjeux qui ont été
bouleversés par la révolution numérique".
Vous affirmez que les
politiques culturelles sont en inadéquation avec les enjeux de notre
époque. Comment cela se traduit-il ? "Les politiques culturelles sont
tournées exclusivement vers les grandes institutions, vers les cultures
institutionnelles. Ce qui veut dire qu’aujourd’hui 95% des budgets de la
culture au niveau national et régional, sont tournés vers l’opéra, vers
l’art lyrique, vers les cultures dominantes. Et l’ensemble des
innovations, des nouvelles cultures, des musiques actuelles doivent se
partager les marges. C’est un problème car les comportements culturels
ont évolué, la révolution numérique a été majeure et a changé
complètement la façon d’être un usager de la culture. D’autant que nous
traversons une période de crise compliquée. Ce qui fait que beaucoup de
gens sont déconnectés des réalités sociales, de vie culturelle et que
l’un des enjeux pour lutter contre la montée des populismes et de la
période très conservatrice dans laquelle nous sommes, ces de reconnecter
la culture avec les différents publics, comme la jeunesse."
Donc
selon vous, le public principalement visé par les politiques publics
est surtout les personnes des centres-villes, les personnes âgées ? "Tout à fait, ce sont le public plus âgé, les CSP+ et en effet les
publics de centre-ville. Les politiques culturelles sont génératrices de
plusieurs types de fractures, notamment de fractures territoriales,
générationnelles mais aussi de fractures sociales. Car je ne pense pas
qu’aujourd’hui que la jeunesse française et européenne puisse se
reconnaitre dans la répartition des budgets de la culture tels qui sont
pratiqués."
A partir de ce constat, que faudrait-il changer à Lyon
? "Lyon est un moindre mal, car il y a eu un certain nombre
d’évolutions et de prises de risques. Malgré tout à Lyon comme ailleurs,
une immense majorité des moyens budgétaires sont fichés vers les
grandes institutions culturelles. Le poids de l’art lyrique ou de
l’opéra dans le financement de la culture pèse extraordinairement lourd
en proportion de son impact social réel. Il faudrait avoir plus de
transparence sur les financements de la culture et avoir la possibilité
de réfléchir à une répartition plus pertinente sur le plan culturel
social global. A aucun moment on dit qu’il faut réduire les budgets de
la culture, au contraire, mais on dit qu’en période de crise il faut
avoir le courage de les répartir de façon plus intelligente."
Ce
sont des sujets que vous abordez avec Gérard Collomb, avec Georges
Képénékian. Sont-ils ouverts à ce type de discussion ? "On se situe à
l’échelle européenne et non pas à l’échelle locale. Mais en effet le
maire de Lyon et l’adjoint à la culture sont présents et participent aux
débats. Le simple fait qu’ils nous invitent à conduire ces débats à
l’intérieur même de l’Hôtel de Ville signifie, sans doute pas une
adhésion à tout ce que l’on raconte, mais au moins une adhésion au fait
que l’on en débatte et c’est déjà intéressant. On parle parfois de
problématiques locales, mais l’enjeu est clairement posé au niveau
européen."
C’est la troisième édition des Nuits Sonores, qu’est
ce que les deux premières ont pu apporter ? "Les deux premières
étaient un peu pilote, parce que l’on était toujours dans une
perspective d’invention d’un projet. On a constitué une communauté
européenne d’acteurs dans le domaine des festivals et des labels et on
s’est rendus compte qu’il y avait des problématiques communes, qu’il y
avait aussi un désir d’être ensemble. On a décidé de ne pas être un
réseau nous-mêmes, mais d’être une plateforme pour les réseaux."
La culture c est bien, mais avant il y a d autres besoins à satisfaire
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