LM : Vous publiez ce vendredi le bilan des six mois du débat public qui a
été organisé sur le projet tronçon ouest du périphérique de Lyon,
rebaptisé l’Anneau des Sciences. Un projet porté par le Grand Lyon et le
Conseil général. Quelles sont vos conclusions, votre bilan ?
"Je
rappelle que nous, la commission particulière, en tirons un
compte-rendu. On ne donne pas d’avis sur le projet parce qu’on est
neutres et indépendants, par contre on en tire des grands enseignements".
LM : Alors quels sont les grands enseignements que vous en tirez ?
"L’Anneau des Sciences est une infrastructure à l’ouest mais il faut
aussi développer les transports collectifs, requalifier l’A6/A7 et
requalifier les centres-villes de l’ouest lyonnais.
Il y a vraiment
un consensus général pour requalifier l’A6/A7. Une petite divergence :
les gens qui habitent à côté voudraient que ça se fasse le plus vite
possible, le Grand Lyon dit ‘ça ne peut se faire qu’après
l’infrastructure routière’, donc dans 15 ans et les gens ne sont pas
contents.
Deuxième point de convergence : le développement des
transports collectifs et des modes doux (vélo, etc…), il faut encore
aller plus loin.
Par contre, là où il y vraiment divergences et
opposition forte c’est sur la question : faut-il ou pas une
infrastructure routière pour résoudre les problèmes. Le Grand Lyon et
les acteurs publics qui soutiennent le projet disent que c’est
indispensable. Beaucoup de participants au débat public disent que ça ne
limitera pas la congestion et que ça va encore plus développer
l’étalement urbain. Les gens iront habiter encore loin, sans que ça leur
prenne plus de temps.
Ce qui a surpris beaucoup de gens au cours du
débat, c’est quand le Grand Lyon annonce que l’infrastructure routière
apportera quatre minutes de gain de temps enter les portes nord et les
portes sud. Les gens ont trouvé que ça ne faisait beaucoup pour 2
milliards et demi d’euros".
LM : Vous avez commandé une étude complémentaire, pourquoi ? Vous aviez des doutes sur les hypothèses émises par le Grand Lyon ?
"C’est ce qui est ressorti du débat. Même avant, quand on a préparé ce
débat public, on a rencontré plus de 80 acteurs associatifs,
économiques, syndicaux. Ils disaient déjà qu’ils n’étaient pas sûrs que
les études aient été étudiées jusqu’au bout. Et au cours du débat on
s’est aperçus que c’était un ressenti général. Donc la CPDP (et c’est la
loi qui l’autorise) a commandité une étude complémentaire pour savoir
s’il aurait d’autres hypothèses. La réponse est oui, il faut élargir les
hypothèses, travailler sur le lien entre transport et urbanisme".
LM : Sur
la requalification de l’A6/A7, on s’est rendu compte qu’il n’y avait
pas besoin d’attendre que l’infrastructure routière soit construite.
"Les experts ne donnent pas un avis sur le projet mais des pistes de
réflexion, comme par exemple ne pas requalifier au même niveau de
véhicule partout, pas rester à 75 000 comme le prévoit le maître
d’ouvrage, mais peut-être descendre un peu plus. Il y a des ouvertures
que le maître d’ouvrage peut prendre en compte pour que le projet soit
plus cohérent avec ce que le public a dit".
LM : Cette étude a aussi donné de l’eau au moulin aux écologistes qui prônent le tout transport en commun dans le contournement.
"Ce n’est pas seulement les écologistes, il y avait aussi les
associations locales. Il s’agit de profiter du projet pour commencer à
développer les transports collectifs dans l’ouest lyonnais avant
peut-être de faire l’infrastructure routière".
LM : Face à ses positions là, le Grand Lyon a-t-il écouté ? Selon vous, va-t-il en tirer les conclusions ?
"C’est la loi qui l’oblige à tirer des conclusions et à prendre des
décisions. Il y aura un débat politique au Grand Lyon au mois de juin.
Ils auront à dire s’ils continuent ou non et dans quelles conditions.
Surtout qu’il y a d’autres choses comme des discussions sur la pollution
atmosphérique, les 42 000 morts par an à cause de cette pollution. Les
tunnels ne sont pas forcément une solution car ça concentre les
polluants, notamment aux hôpitaux sud".
LM : Les habitants de l’est lyonnais ont senti une forme d’inégalité par rapport à ce projet ?
"Ils ont dit que depuis toujours les infrastructures chez eux sont à
l’air libre, notamment la rocade des villages qui est aujourd’hui une
autoroute à 30% de transit, alors que pour l’ouest c’est une autoroute
enterrée à 80% qui est proposée. Et puis ils ont déjà le contournement
ferroviaire et selon le discours du préfet Carenco, ils pourraient
peut-être avoir le contournement pour le transit. Là ils ont dit stop,
il faut un peu d’équité entre l’est et l’ouest, au moins au niveau des
transports."
LM : Vous sentez que le Grand Lyon est arc-bouté sur sa position ?
"Ils semblaient ouverts au début. Au cours du débat ils se sont aperçus
qu’il y avait pas mal d’opposition en réunion publique. Mais ce sont
plutôt les opposants qui viennent, ceux qui sont pour restent chez eux. A
la fin, ils étaient plutôt en train d’essayer de convaincre. A la
réunion de clôture, M. Collomb a fait un peu un discours disant ‘faites
moi confiance, je crois en ce projet, je veux le faire, je le ferai’. Ce
n’était pas une ouverture totale, alors qu’il pourrait y avoir une
ouverture notamment sur les transports collectifs dans l’ouest".
LM : Dans ce genre de projet, le maitre d’ouvrage va-t-il souvent au bout ?
"Sur les 60 débats publics que la CNDP a organisé en 10 ans, il y a en
cinq qui ont été abandonné après un débat public, comme l’extension du
port de Nice, le contournement de Bordeaux ou de Toulouse. Cinq autres
ont été complètement transformés. Mais la majorité va au bout. Celui-ci
ira soit au bout, soit sera aménagé ou modifié, soit il sera hiérarchisé".
Vendredi 24 Mai 2013 à 12h31
Philippe Marzolf sur l'Anneau des Sciences : "Pas une ouverture totale du Grand Lyon lors du débat"
Philippe Marzolf - LyonMag
Philippe Marzolf, le président de la commission particulière du débat public pour l’Anneau des Sciences, était l'invité ce vendredi de Jazz Radio pour l'émission Ça Jazz à Lyon, proposée en partenariat avec LyonMag.
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Anneau des Sciences
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