C’est une chose évidente en ce qui concerne le personnel politique lyonnais (plus les alentours). Après avoir fait passer le bac philosophie à des élus, LyonMag devait continuer avec les autres épreuves. Mais, comme le faisait remarquer Eric Lafond, candidat sans succès aux dernières municipales à Lyon : "la philosophie, ça rassemble tout le monde".
Mais, à quel élu poser la 1ère question du sujet de Physique-Chimie des terminales S : "En quoi l’observation du boson de Higgs permet-elle de compléter la théorie du modèle standard ?" ?
Une série de coups de fil aux attachées de presse de Lyon/GrandLyon/Département/ plus tard : on trouve un seul élu ingénieur : Roland Crimier, maire de Saint Genis Laval. Indisponible lui-même, il suggère le nom d’Annie Guillemot, maire réélue de Bron. Mariette Grande, responsable de la communication de Bron, douche vite tout espoir : certes Annie Guillemot a un diplôme d’ingénieur de l’Ecole des Travaux Public d’Etat, mais elle est en fait géographe et urbaniste. Le CV d’Hélène Geoffroy, maire récente de Vaulx-en-Velin mentionne la même école, mais elle n’a pu être jointe à temps. Rideau sur la physique, tant pis pour le boson de Higgs.
Pas plus de chance avec la Biologie/Géologie. Jean-Paul Bret, maire de Villeurbanne et biologiste sillonne sa ville avec la ministre Najat Vallaud Belkacem quand les sujets tombent vendredi 16h. Christophe Geourjon, biologiste au CNRS, n’est pas inspiré par le sujet, Michèle Rivasi, agrégée de biologie et député européenne est dans l’avion de retour d’Ukraine. Au téléphone elle raconte le projet cofinancé par l’Union Européenne pour permettre un suivi de la radioactivité des aliments consommés par les gens qui vivent aujourd’hui à proximité de Tchernobyl, notamment les femmes enceintes et les enfants. Le projet tarde, les appareils de mesure de la radioactivité (anthropogammamètre) sont à peine arrivés, elle est sur place pour contrôler l’avancement. Le projet inclue des serres propres pour des myrtilles sans radioactivité. Un peu loin des sujets du bac, donc. Rideau sur la biologie, les sujets sont sur internet.
A quel élu demander une réaction sure ce qu’il pense des sujets d’anglais et d’histoire ? Comment trouver un élu qui puisse traiter de "La Chine et le monde depuis 1949" ? Ou du destin de M.Fonseka, qui lit des livres sur un bateau ? Passons donc.
La seule éclaircie viendra de la question posée aux Terminales ES : "Comment la flexibilité du marché du travail peut-elle réduire le chômage ?". Je reçois une position de François Turcas, président de la CGPetitesEtMoyennesEntreprises du Rhône : "S'adapter aux évolutions est un enjeu majeur pour les entreprises. De nombreux pays européens bénéficient d'une souplesse du travail, qui permet une meilleure compétitivité et un enrayement de la hausse du chômage. En France, la rigidité du Droit du travail représente un véritable frein à l'embauche. Les employeurs ne recrutent plus car la possibilité de recourir à des contrats courts ou de licencier pour ajuster leurs effectifs à la demande, est devenue trop complexe".
Au même moment, Raymonde Poncet, économiste chez Renault Truck et élue Verte s’insurge : "Que le sujet demande "comment" la flexibilité du travail va réduire le chômage c’est supposer dès le départ que c’est vrai". Ce qu’elle conteste : "la flexibilité est déjà partout. En interne à Renault Trucks il y a la modulation du temps de travail, l’annualisation. En externe on est à 20% d’intérimaires, et ça fait longtemps que plus personne ne demande à la direction de justifier un tel recours à l’intérim plutôt que de vrais emplois". Si l’élue doute qu’on puisse aller plus loin dans cette flexibilité imposée aux travailleurs et incapable de lutter contre le cœur du chômage, elle plaide pour une autre flexibilité : le flexisécurité "Il faut que les gens qui sortent des entreprises le fassent non pas pour entrer à Pôle Emploi mais pour entrer en formation".
La science, quand elle est sociale, autorise-t-elle plus de discussion ? Convaincu par la position d’Eric Lafond, il faut revenir vers le bac français : "Attendez-vous essentiellement d’un roman qu’il vous plonge dans les pensées d’un personnage ? " (Première L) et laisser la parole conclusive à Alexis Jenni, certes agrégé de biologie au Lycée Saint Marc, mais écrivain, surtout : "Le problème, c’est que les personnages n’existent pas, et les pensées non plus. Alors qu’attend-on ? Regardez autour de vous, il y a des gens qui s’agitent, regardez en vous, il y a un flot d’images mentales que l’on appelle pensées, mais il n’y a rien qui soit aussi structuré et aussi net qu’on le présente dans une roman. Le roman est un objet de langage, très élaboré, et le monde pas du tout. Personnages et pensées sont des fictions, mais des fictions utiles. Une fois qu’on le sait, on peut créer pensées et personnages. C’est pour ça qu’on écrit des romans et qu’on en lit : pour que les figures que l’on appelle personnage tiennent un discours à peu près cohérent, qui nous permette de comprendre quelque chose à ce qui se passe autour de nous, et en nous. Alors, après, ça peut prendre n’importe quelle forme : un discours intérieur où flottent des silhouettes (comme Proust), des dialogues échevelés qui essaient de tout dire (comme Dostoïevski), des éclats poétiques fulgurants (comme Genet), de pures actions décrites (comme Hemingway), tout ceci sont des pensées, un flot de langage qui crée des figures. Le roman n’est que verbe en mouvement, personnages et pensées n’en sont que l’effet".
Brevet des Collèges à venir…
@lemediapol
Sans remettre en question la nullité scientifique d'une grande majorité de politiques, je tiens à signaler que la réponse à la question sur le boson de Higgs était clairement donnée dans les 20 lignes d'énoncé du sujet du bac. Pour simplifier, on demandait juste aux élèves quelle était la couleur du cheval blanc d'Henri IV dans une adaptation juste un peu plus moderne.
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