Il y a vraiment du pétrole dans l’Ain ?
Guy Feugere : Esso avait déjà réalisé des sondages au sud de Nantua dans les années 1980 qui avaient montré une présence de pétrole. Mais à l’époque, le prix du baril n’était pas assez important pour que le gisement soit rentable. Surtout que les technologies utilisées n’étaient pas assez développées pour montrer avec précision ce qu’on allait trouver dans le sous-sol très compliqué du Jura. Mais une chose est sûre : cette zone sédimentaire est prometteuse. D’ailleurs plusieurs entreprises étaient en concurrence avec nous pour décrocher l’autorisation exclusive de recherche. Surtout qu’aujourd’hui, à 130 dollars le baril, ce pétrole devient intéressant.
Ce serait vraiment rentable ?
Au prix actuel, oui. Mais ça dépend aussi de nombreux facteurs. Il faudrait déjà trouver une nappe de plusieurs centaines de milliers de barils et qu’on pourrait exploiter au minimum dix ans. Et surtout, pour que ce soit vraiment rentable, il faut investir un minimum pour trouver avec précision la zone. Mais en tout cas, on estime que ça vaut le coup, car on est prêts à dépenser de l’argent : environ 1 million d’euros rien que pour les recherches.
Comment se déroulent les recherches ?
Dans un premier temps, on reprend toutes les données existantes, géologiques et géophysiques, mais aussi les sondages qui ont déjà été réalisés et qui sont archivés au ministère de l’Industrie. Ensuite, on retravaille ces données anciennes avec les technologies actuelles. Puis on refait de nouvelles analyses sismiques. Avec des camions qui envoient des vibrations dans le sol. Ce qui nous permet ensuite de dresser des cartes et de déterminer des zones où il y a des poches de pétrole et de gaz. L’objectif est de pouvoir réaliser le premier forage. Et c’est là qu’on dépense beaucoup d’argent. Car il faut compter entre 10 et 20 millions d’euros pour les forages.
L’intérêt de ce pétrole ?
On a toujours besoin de nouvelles sources de pétrole. Mais surtout la législation française est intéressante pour l’industrie pétrolière. Car dans de nombreux pays, il faut toujours payer des “bonus”, un impôt pour signer le permis d’exploration, pour produire... Alors qu’en France on ne paye que les taxes classiques. En plus, produire sur place coûte moins cher que de faire venir du pétrole du Nigeria ou des pays du Golfe.
Quand on pourrait produire du pétrole dans l’Ain ?
Pas avant cinq ans. Mais en 2012 on devrait déjà savoir si ce pétrole est exploitable. Et si tout va bien, on fera une première exploitation temporaire pour vérifier que le gisement est vraiment important et qu’on peut réaliser d’autres forages.
Il y a des risques pour l’environnement ?
Non. Il y a quelques années, il y avait des risques pour les nappes phréatiques quand on réalisait des forages. Mais aujourd’hui les nouvelles méthodes permettent de ne pas les polluer. Et il n’y a pas non plus de risque d’incendie ou d’explosion, car tout est très surveillé. Et les puits sont situés dans des zones fermées et sécurisées.
La France produit déjà du pétrole ?
Très peu, c’est-à-dire 1 % seulement du pétrole qu’elle consomme. Un chiffre en baisse, car ça fait longtemps qu’il n’y a plus de recherches. Mais avec la hausse des prix, on assiste aujourd’hui à un nouveau développement de la recherche pétrolière en France avec des petites compagnies pétrolières américaines, anglaises ou françaises qui exploitent des gisements dits “marginaux” et qui sont délaissés par les grandes compagnies.
L’importance de Celtique Energie Petroleum ?
C’est une compagnie moyenne. Avec celui dans l’Ain, on aura trois permis de recherche en France. On va aussi en obtenir un autre en Suisse. Et on négocie d’autres permis en Allemagne, en Pologne, en Italie, en Angleterre et en Afrique. D’ailleurs notre compagnie a été jugée suffisamment intéressante et sérieuse pour que le fonds d’investissement américain Avista Group injecte 50 millions de dollars dans notre entreprise.
Propos recueillis par Laurent Sévenier
L’entreprise
Celtique Energie Petroleum
Forme juridique : SARL
Création : 2004
Implantation : Londres
Activité : prospection et extraction d’hydrocarbures
Capital : 50 millions de dollars investis par Avista Group
Actionnaires : Avista Group en majorité
Effectif : 5 personnes
Le pétrole français
99 % du pétrole consommé en France est importé. Il existe pourtant quelques gisements en Aquitaine, notamment celui de Parentis, ou dans la région parisienne, notamment à Itteville. Toreador Energy France exploite aussi des puits dans le Loiret. Mais la production française de pétrole dépasse à peine le million de tonnes par an. Selon le ministère de l’Industrie “un potentiel en hydrocarbures subsiste encore” dans certaines zones, sur terre comme sous la mer. D’ailleurs, avec l’envolée du prix du brut, les demandes de permis d’exploration sont en hausse. Une dizaine d’entreprises pétrolières travaillent actuellement en France, par exemple le canadien Vermilion, le suédois Lundin, ou les français Total EPF, Pétrorep et Geopetrol qui est notamment présent en Alsace et en Champagne.