Le suspense est à la mesure de l’enjeu. Obtenir le label IDEX pour l’Université de Lyon donnerait lieu à des financements supplémentaires sous la forme d’un capital très important (de l’ordre du milliard d’euros) dont les intérêts entreraient dans le budget de l’Université de Lyon. Des indications sur ce que le jury a pensé du projet lyonnais devraient intervenir dans les prochains jours.
Lors des échecs précédents, ce jury dirigé par le professeur de droit commercial suisse Jean-Marc Rapp avait souligné une dynamique commune insuffisante de la part des différents organismes qui composent l’Université de Lyon (Universités de Lyon 1, Lyon 2, Lyon 3, l’Insa, l’Université de Saint Etienne, l’ENTPE, etc). Pour des raisons en partie politique, un lot de consolation de 27 millions d’euros connu sous le nom de PALSE avait malgré tout été attribué à l’Université de Lyon, afin qu’elle démontre sa capacité à progresser.
Le 20 juin 2016, 5 ans plus tard, le même jury a cherché à savoir si ces promesses de dynamiques communes s’étaient concrétisées. Les questions posées à Jean-François Pinton chef de projet de l’IDEX et directeur de Normale Sup à Lyon qui emmenait l’équipe lyonnaise, ont donc porté autant sur le passé récent que sur le projet futur. Certains signes sont encourageants : par exemple la création d’un diplôme de docteur portant le nom de l’Université de Lyon. En juin 2014 Estelle Demilly soutenait la première thèse en architecture portant le label de "Université de Lyon" à partir d’un travail cherchant à estimer quels éléments du cadre architectural constituaient des outils apaisants pour les personnes souffrant de troubles autistiques.
Les projets de l’équipe Idex, en cas de réponse positive du jury, sont structurés autour de 9 programmes qui doivent montrer comment les sciences de la nature (Lyon 1, ENTPE, Insa…) peuvent se marier avec les sciences sociales (Lyon 2, Lyon 3, Science po Lyon… ). Le programme "Risque et environnement" entend faire travailler des chercheurs capables de modéliser les risques de crue de la Saône en cas de forte pluie avec des géographes urbains capable de décrire les trajets pendulaires des grands-lyonnais qui seront impactés dans leur déplacement. Le programme "Société numérique" pourrait rassembler des informaticiens purs et durs avec des historiens archéologues cherchant à numériser en 3D des figurines issues de fouilles sous le futur parking Saint Antoine.
Sur le papier, les dynamiques à créer entre les écoles, les universités, les centres de recherche paraissent féconds. Dans la vraie vie les choses sont plus complexes. Le jeudi 9 juin, l’Université Lyon 2 tenait une double Assemblée Générale effervescente pour répondre à des "remaniements sensibles" de la candidature Université de Lyon dont les échos venaient juste de s’échapper d’une réunion tenue le 4 juin au Rectorat où la question était posée de savoir si la candidature Idex avait plus de chance d’aboutir si les différentes universités de Lyon disparaissaient au profit d’une unique Université.
Derrière ces remous de dernières minutes, se cache le problème de la gouvernance. "À mon sens, le chef de projet [ie : Jean-François Pinton] doit avoir beaucoup plus de lattitude pour prendre des décisions, dès lors qu'il existe un accord sur les grands principes", estimait déjà le président de l’Université de Saint Etienne Khaled Bouabdallah dans une interview au site Educ Pro en 2011.
Dans quelle mesure le projet Université de Lyon devrait donc faire l’objet d’un débat public ? "Il y a eu un temps d’ouverture et de forum public. Mais c’est un projet concurrentiel et stratégique. Il est donc normal qu’existe une phase de mise sous embargo de manière à préserver l’originalité du projet de Lyon face à la concurrence d’autres universités", estime Pierre Cornu qui a suivi de près l’avancement des travaux pour l’Université de Lyon 2 jusque récemment.
Position dont les tenants d’un service public plus traditionnel cherchent à discuter le bien fondé.